Observatoire français des tornades et orages violents

Palmarès des fausses tornades 2013

Entre mini-tornades et fausses tornades, l'année 2013 a connu son lot de phénomènes trompeurs.

 
 
Amorce de tornade entre Oise et Seine-et-Marne le 18 août 2013. Crédit photo : Thomas MARTIN.
Fausse tornade en Lorraine, le 24 août 2013, près de Longwy. (c) Yohan DENIS
 
 
 
Diagnostiquer une tornade est un exercice délicat, qui demande une expertise spécifique et des techniques d'investigations adéquates. Les équipes de Keraunos mettent ainsi en oeuvre des explorations au sol et des investigations aériennes (survol en avion,...) afin de réaliser des expertises détaillées après chaque événement venteux destructeur. Cette expérience et ces techniques garantissent la fiabilité de la base de données des tornades françaises établie par l'Observatoire.
 
Face à cela, on voit souvent reproché aux medias leur usage immodéré de l'expression "mini-tornade". Néanmoins, on ne peut exiger des journalistes qu'ils acquièrent la technicité nécessaire au diagnostic de tornade. Le terme répandu de "mini-tornade" est ainsi devenu une manière commode de désigner des phénomènes venteux de nature indéterminée, que ce soit dans la presse écrite ou dans les medias télévisuels.
L'inconvénient de cette dénomination, outre le fait qu'elle ne couvre aucune réalité météorologique, est de mettre sur le même plan des phénomènes classiques (rafale descendante) et des événements exceptionnels (la tornade EF4 de Hautmont, pourtant remarquable par son intensité, a ainsi été qualifiée de "mini-tornade"). On note toutefois une attention croissante des medias sur ce sujet, qui se traduit par une consultation de plus en plus systématique des conclusions émises par l'Observatoire Keraunos afin de préciser les contenus diffusés dans la presse ou sur les chaînes de télévision.
 
Cette évolution, très positive, qui consiste à appeler les tornades par leur vrai nom, voit toutefois une tendance inverse s'épanouir de plus en plus nettement. Cette nouvelle mode consiste à considérer comme des tornades des phénomènes qui n'en sont pas. Beaucoup plus répandue sur les réseaux sociaux et les sites Internet que dans les medias, cette propension à voir des tornades là où il n'y en a pas introduit une fausse idée de multiplication effrénée des phénomènes de tornades sur notre territoire et conduit à des effets tout aussi dommageables que l'usage de l'expression "mini-tornade". Voire même davantage dans la mesure où, à la différence de la "mini-tornade" - dont chacun sait qu'elle ne désigne rien de précis - , la tornade désigne un phénomène réel, doté d'une définition scientifique explicite, qui exige dès lors un usage rigoureux.
 
Ainsi, parmi les innombrables fausses tornades qui ont circulé sur Internet en 2013, trois exemples emblématiques ont été sélectionnés afin d'illustrer ces leurres, qui aiment à prendre toutes les apparences des tornades, mais qu'une analyse détaillée permet de démasquer.
 
 

Numéro 1 : fausse tornade près de Longwy (54), le 24 août 2013

Sur le podium des plus belles fausses tornades de l'année 2013, le phénomène observé en Lorraine le 24 août tient une très bonne place. Filmée et photographiée, cette excroissance nuageuse aux allures de tornade s'est répandue sur les réseaux sociaux et le web météo en quelques dizaines de minutes, laissant croire que la Lorraine comptait un nouveau cas de tornade à son actif. Néanmoins, même si l'allure du phénomène semble typiquement celle d'une tornade (voir ci-dessous), le phénomène en question était en réalité inoffensif.
 
En effet, l'analyse détaillée des reports d'observations, de la vidéo et des photographies a permis d'identifier un cas typique d'aspiration saturée non tornadique. Ce type de phénomène se produit lorsque l'air proche du sol, soulevé et "aspiré" par un orage en approche, présente une humidité relative très forte. Une saturation se produit alors rapidement et des lambeaux nuageux viennent s'étirer entre le sol et la base nuageuse, laissant croire à une tornade. Il arrive parfois que ces aspirations soient massives et que des apparences de tornade large soient observées.
 
 
Fausse tornade près de Longwy. Capture d'une vidéo réalisée par Valentin Séverin
 
 
 

Numéro 2 : fausse tornade au Pin (17), le 18 juillet 2013

Un phénomène venteux localisé, virulent et peu durable : tout pouvait laisser penser qu'une tornade s'était abattue sur la petite commune du Pin, en Charente-Maritime, ce 18 juillet, peu après 17h00 locales. Le quotidien Sud-Ouest titrait d'ailleurs "Une tornade dans le village" dans son édition du 20 juillet, et précisait : "Pendant huit minutes, une tornade a traversé la commune, provoquant de nombreux dégâts dans les propriétés et les exploitations agricoles".
 
Mais sous les allures d'un diagnostic évident se dissimulait en réalité l'une des plus belles fausses tornades de l'année. En effet, la conclusion d'une tornade n'a pu résister à l'analyse détaillée des événements : l'enquête menée par Keraunos a permis de mettre en évidence un phénomène tout autre, à savoir une microrafale. La nature et la répartition des dommages, corrélée aux témoignages recueillis, se sont révélés incohérents avec un phénomène tourbillonnaire, et à l'inverse tout à fait typiques des violentes rafales descendantes concentrées et linéaires qui caractérisent le phénomène de microrafale.
 
On trouve ici un exemple de cas qui, faute d'une analyse rigoureuse, aurait pu grossir à tort le nombre de tornades recensées sur ce département.
 
 
Possible tornade en Charente-Maritime le 18 juillet 2013. (c) SUD-OUEST
Dégâts causés par la microrafale du Pin (Charente-Maritime), le 18 juillet 2013. (c) Sud-Ouest (Ysaline SEURIN)
 
 
 

Numéro 3 : fausse tornade à Saint-Etienne (42), le 8 juillet 2013

Le 8 juillet, vers 18 heures, les réseaux sociaux s'animent et plusieurs signalements nous sont transmis : une tornade se serait abattue sur Saint-Etienne, sans faire a priori de dommages importants. Les témoins font état d'un tourbillon parfaitement explicite et virulent, s'élevant dans le ciel.
 
Et pourtant, sous toutes les apparences d'un phénomène qui ressemblait trait pour trait à une tornade pour un oeil peu exercé (voir ci-dessous), c'est un superbe tourbillon de poussière (dustdevil) qui s'est en réalité formé sur Saint-Etienne cet après-midi là. Spectaculaire mais peu dangereux, ce type de tourbillon se développe généralement par temps chaud et peu venté.
 
Encore un cas de fausse tornade qui aurait pu, à tort, constituer la cinquième tornade recensée sur ce département.
 
 
Tanguy DUTEY via Facebook