Les orages en France en 2024 : bilan national d'une année modérément orageuse
L'année 2024 s'est révélée modérément orageuse en terme de fréquence, affaiblie par un début d'année et un mois de juillet peu orageux. Des phénomènes parfois sévères ont été observés, sur le plan de la grêle, des tornades et des rafales de vent. Bilan complet.
Les chiffres clés
Une activité orageuse proche de la normale
Afin d'évaluer de manière précise le niveau d'activité orageuse en France, Keraunos calcule quotidiennement depuis le 1er janvier 2009 l'indicateur de sévérité orageuse (ISO). Il s'agit d'un indicateur multi-paramétrique, qui permet de ne pas se limiter à la seule activité foudre pour qualifier le niveau d'activité orageuse. Il prend ainsi en compte : l'étendue spatiale couverte par les orages, l'intensité des précipitations produites, l'intensité des chutes de grêle et des rafales convectives, ainsi que les occurrences de tornades. L'ensemble permet d'obtenir un score quotidien, qui varie généralement entre 0 et 30, et qui fournit la représentation la plus objective possible du niveau d'activité orageuse sur le pays.
En 2024, le score moyen annuel s'établit à 2,6 pour une normale 2009-2024 de 2,5. L'année a donc présenté un niveau de sévérité orageuse proche de la moyenne des 15 dernières années.
Le graphique ci-dessous présente les moyennes mensuelles, et leur position par rapport aux valeurs enregistrées depuis 2009. Même si l'année est normale dans sa globalité, on note des disparités assez marquées d'un mois à l'autre : l'activité orageuse a en effet été sensiblement plus marquée qu'à l'ordinaire en mars, mai, octobre et décembre ; et à l'inverse moins significative que d'habitude en janvier, juin et novembre. De manière originale, le coeur de la saison orageuse a été globalement assez peu actif : juin, juillet et août ont présenté des niveaux d'activité orageuse inférieurs à la moyenne des 15 dernières années, les épisodes orageux de grande envergure ayant été rares.
L'analyse des valeurs quotidiennes de l'I.S.O montre clairement, comme chaque année, que plusieurs vagues orageuses ont concerné la France en 2024. L'activité la plus significative a été relevée essentiellement en milieu de mois de mai. Par la suite, quelques pics parfois intenses mais plus espacés sont identifiés.
La journée la plus orageuse de l'année 2024 s'est produite en début d'été, le 29 juin, avec un score de 27. Il s'agit du maximum annuel le plus bas des 5 dernières années.
Pour plus d'informations, consultez les bilans mensuels de l'année 2024, et les données détaillées par département.
234 jours avec orage en France en 2024 : une fréquence proche de la normale
Au niveau national, on dénombre 234 jours avec orage en 2024 (236 en 2023), soit une valeur conforme à la moyenne des 15 dernières années. 64% des journées de l'année ont ainsi été marquées par au moins un orage sur la France. Ce score est tiré vers le bas par un début d'année et un mois de juillet peu orageux.
Comme les cinq années passées, aucun département ne dépasse la barre des 100 jours avec orage sur l'ensemble de l'année. C'est dans les Alpes-Maritimes que les orages ont été les plus fréquents cette année avec 87 jours comptabilisés. Viennent ensuite les départements de Haute-Corse, des Landes et des Pyrénées-Orientales avec 78 jours, des Vosges avec 77 jours, du Doubs avec 76 jours et des Pyrénées-Atlantiques avec 75 jours.
Cette année, les orages ont été sensiblement moins fréquents sur le nord-ouest du pays, ce qui est conforme à la climatologie. Mais ces fréquences plus faibles débordent jusqu'au centre-ouest du pays, ce qui est davantage notable. Ainsi, hormis Paris et la petite couronne, dont le chiffre est à considérer en regard de leur très faible superficie, il n'a été relevé que 37 jours d'orage dans les Deux-Sèvres ou 39 jours en Vendée, ce qui est assez faible. Mais c'est dans le Finistère (29 jours) et dans le Morbihan (34 jours) que les scores sont les plus bas.
Par rapport à la moyenne, la France enregistre un léger déficit de jours d'orage qui s'élève à -6 jours. A l'échelle départementale, on observe des déficits très fréquents sur la moitié ouest de la France, mais également sur un petit quart sud-est du territoire. Les déficits les plus importants sont observés en PACA, et notamment dans les Hautes-Alpes (-10 jours), dans le Vaucluse (-9 jours). L'ouest du Massif-Central enregistre également des déficits significatifs avec -7 jours en Haute-Vienne ou dans le Creuse.
A l'inverse, les excédents sont très marqués dans l'est et surtout dans le nord-est. Dans les Vosges, on relève +20 jours d'orage, +17 dans le Haut-Rhin et +14 dans la Loire. Doubs, Lozère et Haute-Marne enregistrent des excédents de +13 jours.
De manière logique, l'activité foudre associée aux orages a été faible dans le centre-ouest et le nord-ouest du pays en 2024, comme le montre la carte ci-dessous. Des densités foudre localement fortes ont été en revanche observées près des Pyrénées, et surtout de la vallée du Rhône à la Lorraine :
Grêle et violentes rafales plus fréquentes du nord-est au sud du pays
30 tornades certaines (liste 1) ont été recensées en 2024, dont une d'intensité EF2 à Carlepon dans l'Oise le 18 juin. On relève par ailleurs près de 356 rafales convectives > 90 km/h, environ 6200 chutes de grêle > 2 cm, près de 3400 lames d'eau significatives et 110 dégâts significatifs dus à la foudre.
Orage supercellulaire sur le Pas-de-Calais, en phase prétornadique, le soir du 8 avril 2024. © KERAUNOS
Les cartes ci-dessous (vert : fortes chutes de grêle, jaune, orange et rose : rafales convectives > 90 km/h, micro/macrorafales, bleu : pluies intenses, rouge : dégâts dus à la foudre) présentent la répartition géographique de chaque phénomène observé.
On note une activité grêle encore assez marquée cette année avec de multiples fortes chutes qui ont provoqué des dégâts significatifs notamment sur le sud du pays.
Les événements venteux sont quant à eux assez bien répartis sur les deux tiers sud du territoire mais les occurrences de micro/macrorafales sont bien plus importantes sur un grand quart nord-est du pays. La répartition spatiale des événements pluvieux intenses a été plus fortement représentée sur les régions du sud-est, ce qui est là aussi conforme à la climatologie.
Rafales convectives > 90 km/h (jaune), microrafales (orange) et macrorafales (rose) recensées par Keraunos en 2024. © KERAUNOS
Une année 2024 encore bien instable
L'année 2024 a été plus instable que la normale sur la majeure partie de l'Europe, de l'Orient et de l'Amérique du Nord, ainsi que dans le nord-ouest de l'Afrique et les régions polaires. A l'inverse, l'instabilité a été moins marquée qu'à l'ordinaire sur certaines portions de l'Atlantique Nord, la majeure partie de l'Afrique et en Sibérie.
La France a donc été concernée par un excédent d'instabilité en 2024. Et cet excédent s'est avéré significatif : l'année 2024 ne bat pas le record d'instabilité établi en 2022, mais arrive néanmoins en quatrième position des années les plus instables en France depuis les années 1940. L'anomalie positive a été particulièrement marquée sur le quart nord-est du pays, notamment en Meurthe-et-Moselle, dans les Vosges et la Meuse, où l'on note des rapports à la normale proches de 100%, c'est-à-dire une instabilité moyenne plus de deux fois supérieure à la normale. La Corse a également enregistré une instabilité deux fois plus forte qu'à l'ordinaire en 2024. Seuls le département de l'Hérault et une portion de l'Aude ont présenté un déficit d'instabilité durant cette année.
Au total, l'année 2024 constitue la 8ème année consécutive avec instabilité excédentaire en France. Il faut en effet remonter à 2016 pour observer une instabilité moyenne inférieure aux normales 1991-2020.
Malgré cet excédent d'instabilité, l'activité orageuse n'a pas été particulièrement fréquente et intense, comme on l'a vu plus haut, en raison principalement d'un défaut de forçages ou de cisaillements durant les journées les plus instables. Toutefois, lorsque ces forçages se sont présentés sur le pays, la très forte instabilité en présence a permis la formation d'orages parfois violents.
Sur un plan thermique, l'ensemble de l'Europe a connu en 2024 des températures supérieures aux normales, autant dans les basses couches (vers 1500 mètres ci-dessous à gauche), qu'en altitude (vers 5500 mètres ci-dessous à droite). Cette situation s'inscrit dans la continuité des années précédentes, qui avaient déjà enregistré des excès de chaleur sur la majeure partie du continent européen. Comme en 2023, on note en 2024 une anomalie fraîche étirée du Groenland à l'Islande ; il s'agit de la seule région européenne avec déficit durant cette année.
A grande échelle, les excès de chaleur les plus remarquables en basses couches ont été observés en Europe de l'est, sur l'est du Canada et sur les régions polaires. A l'inverse, les températures ont été anormalement fraîches en Extrême-Orient et sur le nord-est de l'Afrique :
Sur un plan dynamique, on note en 2024 un contexte à dominante dépressionnaire sur le nord-ouest de l'Europe, France incluse. Les pressions ont été plus basses que la normale, notamment sur le nord du pays, ce qui a conduit à de fréquents passages perturbés, producteurs d'un total pluviométrique largement excédentaire sur la plupart des régions françaises.
Corollaire de cette configuration, les contenus en eau précipitable ont été plus élevés qu'à l'ordinaire sur l'Europe, ce qui a pu favoriser la survenue ponctuelle de pluies particulièrement intenses sous orages :