Violente dégradation orageuse le 11 juillet : supercellules, MCC et derecho transfrontalier
Grêlons de 10 cm et violentes rafales du nord-est de la France à l'Autriche
En fin de journée du 11 juillet, les premiers orages se sont développés dans les secteurs les plus instables et soumis à la plus forte convergence, à savoir le Puy-de-Dôme, l'Allier, le nord de la Loire et du Rhône. De violentes supercellules ont circulé de manière continue sur le secteur, avant de gagner Nièvre, Saône-et-Loire et Bourgogne.
Ces supercellules ont été en capacité de produire des grêlons de 3 à 8 cm de diamètre. Quelques grêlons géants, de 10 cm de diamètre ont été récoltés ça et là.
Par la suite, d'autres orages ont rapidement éclos sur tout le nord-est, de la Franche-Comté à la Lorraine et l'Alsace. Ces derniers, très souvent de nature supercellulaire, ont provoqué de violentes chutes de grêle.
Les rafales de vent ont commencé à devenir intenses à partir du nord Franche-Comté jusqu'au Territoire de Belfort et à l'Alsace, avec des valeurs de 100 à 110 km/h assez généralisées.
L'initiation de l'épisode venteux transfrontalier s'est donc effectuée en France, près des frontières. Par la suite, jusqu'en fin de nuit du 11 au 12 juillet, de violentes rafales ont concerné la Suisse (143 km/h dans la région de Zurich), le sud de l'Allemagne au-delà de Munich (137 km/h à Münchsmünster ou 133 km/h à Altenstadt), l'Autriche (124 km/h sur le Feuerkogel ou 122 km/h sur le Waizenkirchen en Haute Autriche).
Ainsi, dans un vaste couloir dont le grand axe dépasse 500 km, des rafales supérieures à 90 km/h, dont plusieurs supérieures à 120 km/h espacées d'au moins 64 km, ont été identifiées. Les critères du derecho sont ainsi remplis. On désigne par "derecho" les épisodes orageux qui se distinguent par une production de rafales descendantes particulièrement durable, forte et étendue.
>>> en savoir plus sur les derechos
Le système orageux responsable de ces violentes rafales a atteint des proportions considérables à partir de 17h UTC, avec des sommets nuageux qui ont couvert en soirée une superficie de plus de 200.000 km². La superficie couverte par des températures < -50°C au sommet des nuages a atteint jusqu'à 180.000 km².
Ce système a ensuite conservé ces dimensions et caractéristiques remarquables jusqu'à 0h UTC voire davantage. Ainsi, les critères de Maddox sont remplis et ce système relève donc de la catégorie des MCC (Complexe Convectif de méso-echelle). Des systèmes convectifs d'une telle ampleur sont rares.
>>> en savoir plus sur les Complexes Convectifs de Méso-échelle (MCC)
Plus de 40.000 décharges de foudre ont été comptabilisées au cours de cette dégradation, comme l'illustre l'empreinte foudre de l'épisode ci-dessous :
Suivi de l'épisode orageux
Suivi à 22h30 loc.
Le risque de phénomènes violents s'amenuise sur le nord-est du pays à présent avec évacuation des orages venteux par l'Allemagne. Des orages continuent à concerner le sud Bourgogne et nord Rhône-Alpes mais là aussi le potentiel violent va décroître, une bonne partie de l'énergie convective disponible ayant été épuisée.
Une nouvelle salve orageuse démarre par le sud-ouest en cette fin de soirée. Elle va remonter ensuite vers Rhône-Alpes la nuit prochaine et y restera demain mercredi (surtout sur le sud de la région et les Alpes).
Les orages qui ont marqué la journée ont fréquemment été violents, en raison de la grêle (5 à localement 10 cm) et des rafales. Au niveau des cas venteux, les remontées locales sont souvent assez lentes et seront examinées au fil des prochains jours pour déterminer l'intensité des vents (les stations n'ayant mesuré que 100/120 km/h). On remarque sur la carte foudre de l'épisode une grosse densité électrique, surtout sur le nord Auvergne, nord Rhône-Alpes et Bourgogne.
Fin de suivi de cet épisode.
Suivi à 21h15 loc.
La zone orageuse se maintient avec une alimentation continue entre Loire et Puy-de-Dôme où se succèdent de puissantes cellules.
D'autres cellules virulentes produisent de puissantes rafales et de la grêle, notamment entre le nord Haute-Saône, le sud Haute-Marne et les Vosges, ainsi que sur le sud du Haut-Rhin (110 km/h relevé à Belfort et Mulhouse).
Un vaste système convectif linéaire n'est pas parvenu à se développer, comme anticipé par quelques modélisations. Les puissantes rafales seront ainsi plus dispersées mais avec des valeurs qui seront probablement > 130/140 km/h sur plusieurs zones.
On note une reprise de l'activité par les Pyrénées. Cette seconde salve devrait être moins violente que la première et gagnera Rhône-Alpes dans le courant de la nuit prochaine.
Suivi à 20h15 loc.
Les orages violents sont nombreux du nord Rhône-Alpes à l'Alsace et à la Lorraine et on ne compte plus les supercellules grêligènes. Localement, de très violentes rafales sont observées, comme à Dijon et dans sa région. Localement encore, des grêlons géants sont signalés sur le sud de la zone (nord Rhône-Alpes).
La convection est en train de s'organiser davantage en un système multicellulaire peu construit. Ainsi, les rafales de vent extrêmes seront probablement ponctuelles au passage de mésocyclones ou de petites structures linéaires.
La superficie couverte par des occurrences d'orages violents à extrêmes est remarquable ce soir et ne se produit pas tous les ans.
Suivi à 19h00 loc.
Les foyers convectifs sévères sont maintenant nombreux entre Loire, Rhône, Allier, Saône-et-Loire et Nièvre et tendent à remonter vers le sud Franche-Comté tout en se multipliant. Les mésocyclones observés par clichés sur le terrain sont imposants et à même de supporter des chutes de grêle localement proches de 8 voire 10 cm de diamètre.
D'autres structures intenses se manifestent désormais sur le sud de la Lorraine, là encore sous forme supercellulaire. La convection a explosé en 2h, entre 16h30 et 18h30 comme l'illustre cette image satellite visible.
De probables microrafales sont à même de se déclencher sous ces supercellules. Une tendance au multicellulaire arqué est observée depuis 18h30 sur la Saône-et-Loire. Le potentiel venteux devrait ainsi finir par se manifester violemment et de façon plus étendue.
Suivi à 18h00 loc.
La convection a explosé depuis le dernier point, comme on pouvait s'y attendre. On observe désormais plusieurs violentes supercellules, notamment entre Allier, Puy-de-Dôme, Nièvre, Loire et Rhône. L'initiation de la convection est conforme aux prévisions des modèles à rafraichissement rapide.
Il est probable que de violentes chutes de grêle et des microrafales se produisent sous ces orages actuellement. Les images satellite mettent en évidence des sommets pénétrants remarquablement froids, sous les -75°C, qui percent la tropopause au-dessus de 13 km d'altitude. Les valeurs d'instabilité excèdent 3000 J/kg si bien que les moindres départs convectifs tendent à entrer en rotation facilement.
Au cours de la prochaine heure, la convection va encore s'amplifier avec constitution possible d'un système multicellulaire très venteux.
Suivi à 16h45 loc.
Convergence de basse couche et forte instabilité sont présentes, les points de rosée sont conformes aux prévisions sur les zones précédemment ciblées (nord Rhône-Alpes, nord Auvergne, Bourgogne).
Les premiers amorçages convectif sont observés sur le Massif Central mais les observations visuelles commes les images radar pointent pour le moment un manque d'humidité dans les basses couches et des bases élevées (le facteur limitant des orages aujourd'hui). D'ici 1 à 2h, la convection devrait pouvoir prendre de l'ampleur pour devenir sévère, sur un axe privilégié entre nord Rhône-Alpes, Ain, Franche-Comté, Alsace.
Plus au nord, quelques supercellules grêligènes fortes ont déjà circulé sur les Vosges ou dans l'Yonne et l'activité orageuse se poursuit sur le nord Lorraine et localement sur le nord-ouest de la Bourgogne.
Suivi à 14h loc.
La zone de convergence s'établit plus franchement entre l'Allier, le sud du Centre, l'ouest de la Lorraine et de la Bourgogne avec des points de rosée proches de 22°C (parfois plus) et souvent dans les 34°C au niveau T2m. Les premiers orages à bases élevées (niveaux de condensation encore hauts) éclatent comme attendu du Centre à l'Yonne et au sud Champagne.
L'environnement est à présent très instable avec souvent plus de 3000 J/kg de SBCAPE et des SBLi proches de -9/-10K. Le thalweg thermique vient buter sur la dorsale anticyclonique en place sur le sud-est, resserrant sensiblement le gradient de vent dans les couches basses et moyennes de l'atmosphère. On estime à 70 km/h le jet à 700 hPa et celui-ci devrait gagner 10/20 km/h encore.
D'ici 1 à 2h, les premiers orages devraient éclore, de nature supercellulaire, à même de générer de fortes chutes de grêle et des microrafales. La convection s'amplifiera sensiblement ensuite en deuxième partie d'après-midi pour éventuellement aboutir à un système orageux de grande échelle, doté d'un potentiel venteux destructeur.
Suivi à 12h loc.
A la mi-journée, on observe des températures de 32 à 34°C sur le nord de Rhône-Alpes (zone la plus chaude aujourd'hui). Les points de rosée sont supérieurs à 20°C des Pyrénées au Limousin, à la Bourgogne et aux Vosges, ce qui es conforme à la prévision.
Une convection assez peu profonde a démarré sur la région Centre, l'une des zones d'initiation de la convection, à l'aplomb du thalweg thermique qui gagne par la Manche. On observe d'ailleurs des températures à 500 hPa qui tendent à baisser par le NO, trace du thalweg thermique prévu (image de droite).
Les vents de sud commencent à s'établir en vallée du Rhône et sur le Massif-Central, alors qu'un flux de sud-ouest en surface se matérialise sur une vaste portion NO de la France. L'instabilité s'échelonne entre 2000 et 2500 J/kg de SBCAPE sur la zone à risque à la mi-journée, localement plus de 3000 J/kg sur le Massif-Central avec des profils déjà bien cisaillés (25/30 m/s en profondeur).
Il existe encore quelques incertitudes sur le timing exact de la dégradation, mais cela se joue à 2h près selon les différents scénarios.
Les dernières projections haute résolution, à rafraichissement rapide confirment le potentiel venteux remarquable attendu sous les orages. Des structures arquées, susceptibles de comporter des courants descendants très virulents sont proposés :