Observatoire français des tornades et orages violents

La tornade de Dampniat du 27 octobre 2023 se développe en bordure sud d'une structure de type supercellulaire, elle-même issue d'un système convectif qui est déjà visible au large de la Gironde sur les images radar de 12h TU (14 heures locales). Selon un sens de déplacement de l'ouest vers l'est (270°), le système traverse la côte girondine à Soulac-sur-Mer vers 13h TU. Alors qu'une activité orageuse se manifeste dès 13h30 TU, une division cellulaire semble s'opérer au sud-ouest de Guimps (Charente) à 13h55 TU. Moins de trente minutes plus tard, la structure supercellulaire moteur droit est à maturité et déverse de la grêle, tout en déviant légèrement du flux (280°). Très intense en Dordogne (intensités supérieures à 300 mm/h à 15h05 TU au sud de Bourdeilles), la supercellule semble perdre un peu en intensité en Corrèze, mais reste bien visible au nord de Brive-la-Gaillarde à 16h35 TU. 

Vue de la cellule à l'origine de la tornade, depuis l'agglomération de Brive-la-Gaillarde, vers 18h30/18h45 locales: 

La cellule aborde ensuite le confluent de la Roanne et de la Corrèze à 16h45 TU, heure où la tornade est filmée depuis Albignac (1,5 km au sud). Dès 17h TU, le système s'affaiblit rapidement, jusqu'à se dissiper définitivement dans le Cantal vers 17h50 TU.

La vidéo du phénomène, prise depuis le lieu-dit Flaugeat (Albignac), montre une masse nuageuse en rotation, accompagnée de débris en début de séquence. Les premières secondes semblent coïncider avec la circulation du phénomène sur un coteau de la rive gauche de la Roanne, au sud des Rasclies. De toute évidence, le tourbillon est peu structuré et le contact au sol chaotique, ce qui se vérifie dans l'analyse des dommages. Le flash visible en cours de séquence pourrait être le résultat d'un arc électrique, à la suite d'une chute d'arbre sur le réseau EDF : 

Le relevé des dommages permet d'attester d'un phénomène d'intensité EF1, avec une emprise au sol très irrégulière et caractéristique des tornades de relief (au sud des Rasclies, le couloir atteint 250 mètres de largeur). Comme pour le cas de Champagnac-la-Rivière (Haute-Vienne) du 11 janvier 2016, tout porte à croire que cet environnement singulier a dû influencer la structure du tourbillon, voire même sa trajectoire au sol (260°), légèrement déviée du flux directeur (280°).

La trajectoire retenue (3,4 kilomètres), appuyée d'une reconnaissance de terrain par le maire de Dampniat, apparaît comme un minimum. La tornade semble avoir frôlé plusieurs hameaux (la Francie, les Rasclies, Bourret, les Clèdes) où le phénomène a été ressenti, mais sans dégâts signalés. 

Photographie des principaux dommages dans la vallée de la Roanne : 

La tornade de Dampniat s’est formée au sein d’un flux zonal dépressionnaire et fortement perturbé, piloté par un minimum calé au large de l’Irlande. Une grande moitié sud du pays est positionnée en journée sur le flanc nord du courant-jet (ci-dessous à gauche), qui présente un axe virulent entre Baléares et Croatie. Un thalweg d’altitude secondaire circule dans ce flux à l’étage moyen en cours d’après-midi. Il est associé à une petite goutte froide (-26°C à 500 hPa), qui se prolonge jusqu’aux Charentes et au Limousin en un thalweg thermique bien marqué (ci-dessous à droite).

En basses couches, une langue d’air d’origine tropicale ne s’évacue que progressivement de la façade Atlantique en cours d’après-midi (ci-dessous à gauche). La conjonction avec la circulation froide en altitude génère des profils de masse d’air instables sur une grande partie du pays, avec une MUCAPE qui dépasse parfois 500 J/kg et des indices de soulèvement proches de -2 à -3 K. Dans le quart sud-ouest du pays, la présence de forts cisaillements près du sol comme en profondeur a permis la formation d’aux moins deux tornades en quelques heures.