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Macrorafales de forte intensité (D3) entre la Haute-Garonne et l'Aude le 29 juillet 2023
Dans la soirée du 29 juillet 2023, une supercellule provoque une série de macrorafales de forte intensité (D3-) entre la Haute-Garonne et l'Aude. L'épisode, qui dure près de 2 heures, traverse une cinquantaine de communes et provoque de nombreux dégâts matériels.
Presque au même moment, une autre supercellule traverse la Haute-Garonne, l'Ariège, l'Aude et les Pyrénées-Orientales et provoque des dégâts similaires, en particulier dans la région d'Espezel.
Principales caractéristiques de la macrorafale
* intensité maximale : D3, soit des vents estimés entre 150 km/h et 180 km/h
* superficie touchée estimée : 800 km²
* principale(s) commune(s) traversée(s) : LONGAGES, PUYDANIEL, AUTERIVE, CINTEGABELLE, CAIGNAC, MAS-SAINTES-PUELLES, ALZONNE, CAUX-ET-SAUZENS, CARCASSONNE, TRÈBES
* département(s) : HAUTE-GARONNE (31), AUDE (11)
* altitude moyenne du terrain : 200 mètres
* type de terrain : territoires artificialisés, territoires agricoles
* principaux dégâts : arbres déracinés ou sectionnés ; champs couchés ; bottes de paille déplacées et roulées à grande distance ; toitures de maisons en partie emportées ; un hangar soufflé ; monuments funéraires déplacés ; poteaux électriques à basse tension couchés ; projections à distance
Trajectoire parcourue par les macrorafales
Trajectoire parcourue par les macrorafales du 29 juillet 2023 entre 18h55 TU (Savères, Haute-Garonne) et 20h40 TU (Capendu, Aude) © Keraunos (fonds de carte : Google Maps)
Chronologie de l'épisode
L'épisode de macrorafales du 29 juillet 2023 entre la Haute-Garonne et l'Aude est liée à la circulation d'une supercellule de très forte intensité, dont la durée de vie est estimée à 3h30 environ.
Tout commence à 16h50 TU (18h50 locales) avec la naissance d'une cellule convective au nord de Pau (Pyrénées-Atlantiques). Environ une demi-heure plus tard, vers 17h25 TU, la transition de la celulle s'opère à l'est de Lembeye, avec des intensité pluvieuses déjà significatives (150 mm/h). La supercellule ainsi constituée, qui évolue vers l'Est (280°), déverse une grande quantité de grêle mais les diamètres restent peu significatifs (1 à 2 cm). A 18h15 TU, la supercellule traverse Masseube, puis Lautignac à 18h50 TU. Ses proportions sont remarquables : à 18h55 TU, la superficie frappée par des précipitations intenses atteint près de 200 km², avec des intensités maximales supérieures à 400 mm/h. Cette phase de maturité semble coïncider avec les premières rafales de vent destructrices qui sont signalées à l'ouest de Bérat à cette même heure.
De 18h55 TU à 19h50 TU, un premier épisode de macrorafales d'intensité significative (D2 à D3-) est observé sur un parcours d'environ 60 kilomètres. Les vents violents touchent successivement Longages (19h05 TU), Auterive (19h20 TU), Cintegabelle (19h25 TU), Caignac (19h40 TU), enfin Mas-Saintes-Puelles (19h50 TU).
Alors que la supercellule perd peu à peu en intensité, les rafales sont rétrogradées en intensité D1 jusqu'à l'ouest d'Alzonne (20h05 TU), avant de regagner en vigueur (D2) sur une trajectoire supplémentaire de 30 km : Caux-et-Sauzens (20h15 TU), Carcassonne sud* (20h25 TU), Trèbes (20h30 TU) jusqu'à Capendu (20h40 TU). La supercellule se dissipe à partir de 21h TU à l'est de Lézignan-Corbières.
* rafale de 126 km/h mesurée à la station météorologique de Carcassonne-Salvaza (source Météo-France).
Toitures endommagées, arbres arrachés, ballots de pailles roulés à distance
Avec pas moins de 50 communes touchées et une distance totale parcourue de 120 kilomètres, la superficie estimative de l'épisode venteux atteint 800 km². L'analyse des dommages dans le périmètre Puydaniel/Auterive/Cintegabelle (vallée de l'Ariège) permet d'attester de macrorafales de forte intensité (D3-) sur l'échelle des downbursts élaborée par Keraunos. Ailleurs, les rafales sont estimées entre 120 km/h et 150 km/h (D2) sauf autour de Castelnaudary où le phénomène semble moins notable et les rafales inférieures à 120 km/h (D1).
Les zones touchées sont principalement rurales, ce qui explique que les dommages sur les bâtiments soient relativement limités : arbres déracinés ou sectionnés, champs couchés, bottes de paille déplacées et roulées à grande distance, toitures de maisons en partie emportées, un hangar soufflé, monuments funéraires déplacés, poteaux électriques à basse tension couchés, projections à distance.
Illustrations des principaux dommages :
Ballots de paille roulés à distance entre Auterive et Cintegabelle (Haute-Garonne) © La Voix du Midi Lauragais
Remorque retournée dans une ferme entre Auterive et Cintegabelle (Haute-Garonne) © La Voix du Midi Lauragais
Alzonne (Aude) - Une partie du toit de la maison Thène emportée et projetée à distance © L'Indépendant
Une seconde supercellule destructrice 45 kilomètres au sud
Alors que le centre de la Haute-Garonne et le nord de l'Aude sont frappés par cet épisode de macrorafales durables, une seconde supercellule est observée simultanément environ 45 kilomètres plus au sud. Selon les mêmes caractéristiques mais avec une durée de vie un peu plus longue (4h), elle prend naissance vers 16h20 TU (18h20 locales) à l'est de Sarrancolin (Hautes-Pyrénées), tout en évoluant vers l'Est. Elle traverse successivement les agglomérations de Saint-Girons (17h45 TU) puis de Foix (Ariège, 18h25 TU). Au-delà de Foix, la composante supercellulaire se vérifie pleinement sur les images radar, avec une déviation assez marquée vers l'ESE, et une forte accentuation des intensités pluviométriques (>300 mm/h).
Vers 19h05 TU, une première série de macrorafales se déclenche dans le secteur de Belcaire, Roquefeuil, Espezel et Belvis (liste non exhaustive) dans l'Aude. La supercellule poursuit son transit en direction des Pyrénées-Orientales : Trévillach (19h45), Millas (20h00 TU) et Canohès (20h10 TU) où les intensités pluviométriques deviennent extrêmement élevées (> 400 mm/h). Dans tout ce secteur, des dégâts venteux modérés sont signalés, mais c'est surtout la grêle qui provoque des dommages aux cultures (grêlons abondants mais de faible diamètre). La supercellule se dissipe presque instantanément en approchant le littoral peu avant 20h30 TU.
L'analyse des dommages permet de valider un niveau d'intensité D2+ (rafales proches de 150 km/h) au plus fort de ce second épisode, sur une trajectoire totale d'environ 75 kilomètres et marquée par davantage d'interruptions que pour le premier cas.
Analyse du contexte météorologique
Un minimum d’altitude calé au nord de l’Irlande pilote un rapide flux d’OSO sur la France le 29 juillet 2023. En fin de journée, l’Occitanie est située en entrée droite d’une branche de jet, en lien avec le passage d’un petit thalweg secondaire sur la zone. Le soulèvement dynamique associé est marqué.
Vent moyen à 250 hPa et Z250 le 29 juillet 2023 à 18h TU. Modèle WRF 10 km Europe, run du 29.07.2023 12Z. © KERAUNOS
Température et vent moyen à 500 hPa le 29 juillet 2023 à 18h TU. Modèle WRF 10 km Europe, run du 29.07.2023 12Z. © KERAUNOS
Près du sol, un front froid s’enfonce par le nord-ouest du pays. A l’avant, une masse d’air d’origine subtropicale, caractérisée par des thêta’w comprises entre 21 et 22°C à 850 hPa, s’étire des Pyrénées aux Alpes. Les profils verticaux sont dès lors fortement instables sur ces régions en cours d’après-midi et de soirée, avec des valeurs de MUCAPE qui avoisinent souvent 2000 J/kg.
Dans ce contexte, par ailleurs bien cisaillé, plusieurs séries de supercellules trouvent un environnement favorable à leur formation et à leur intensification, notamment dans l’ouest de l’Occitanie et en vallée du Rhône.
En savoir plus sur les microrafales et les macrorafales
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