Observatoire français des tornades et orages violents

La tornade de Saint-Etienne-du-Grès du 7 septembre 2022 se développe peu avant 21h55 TU (23h55 locales), au sein d'une petite cellule convective qui évolue juste à l'avant d'un QLCS (Quasi-Linear Convective System). Le phénomène a pu être identifié à l'appui d'une enquête de terrain réalisée par Darian Martens et Florian Tourrette peu de temps après l'événement (les observations au niveau du sol sont enrichies de vues aériennes postérieures à la tornade). Le tourbillon présente toutes les caractéristiques d'une tornade de relief, avec une emprise chaotique au niveau du sol et une généralisation des dégâts sur le flanc droit du couloir (ce qui tend à confirmer un sens de rotation cyclonique). 

Le long d'une trajectoire de 2,4 kilomètres, marquée par quelques inflexions au niveau du sol, le phénomène produit des dégâts essentiellement forestiers, avec une estimation de 150 arbres (dont de nombreux pins) ébranchés, déracinés ou sectionnés. Les premiers dommages sont identifiés à proximité de la D32 à Tarascon, où des branches d'oliviers sont brisées, et des plants de cannes arrachés et transportés à distance au nord-est de la chapelle Saint-Gabriel. On observe, sur le flanc gauche du couloir, deux pins déracinés (O > E et NO > SE), tandis que plusieurs branches sont brisées (dont l'une vers le nord) sur le flanc droit. Cette disposition des dommages, qui n'est pas encore influencée par le relief, tend à confirmer le caractère symétrique de l'axe de convergence avant que la tornade ne traverse le massif.

Dans le massif des Alpilles proprement dit, les dommages sont marqués par une certaines irrégularité, avec une prédominance d'arbres atteints sur tous les flancs exposés au vent. Du Petit Fontanille (Tarascon) à l'avenue d'Arles (Saint-Etienne-du-Grès), les mêmes dommages se répètent : pins ébranchés, déracinés ou sectionnés. Les sens de chute semblent décrire une succession de virgules plus ou moins évasées (SE > NO, S > N, plus rarement SO > NE, ESE > ONO ou NE > SO), conséquence notable de l'influence du relief (à l'ESE du Mas Bret, une largeur maximale de 180 mètres est observée). 

A l'approche de l'agglomération de Saint-Etienne-du-Grès, un arbre est encore endommagé entre l'avenue d'Arles et le château de Pomeyrol. Au-delà de ce dernier point, plus aucun dommage convergent n'est observé*.

La tornade de Saint-Etienne-du-Grès peut être classée en intensité EF1 sur l'échelle de Fujita améliorée.

* d'autres dégâts diffus ont pu être identifiés entre le Mas de Rique et Laurade. Ils peuvent être la conséquence du passage du QLCS proprement dit. Un témoignage recueilli au camping Porte des Alpilles signale d'ailleurs "un phénomène qui a duré plusieurs minutes".

Dans les mêmes circonstances, une seconde tornade EF1 est observée au sud et à l'est de Saint-Rémy-de-Provence. Le phénomène succède à la tornade de Saint-Etienne-du-Grès de quelques minutes à peine. Les dégâts produits sont très similaires, dans un environnement de relief toutefois nettement plus marqué. Une telle configuration est rarement observée en France, les deux phénomènes n'étant séparés que d'une dizaine de kilomètres.

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La tornade de Saint-Etienne-du-Grès s'est formée dans un contexte très dynamique, au passage d'un thalweg d'altitude piloté par un minimum positionné sur l'Irlande. L'axe de thalweg a généré une cassure nette du jet en abordant la vallée du Rhône ; celle-ci s'est alors retrouvée dans une configuration d'entrée droite / sortie gauche simultanée (ci-dessous à gauche). Le fort soulèvement dynamique associé à ce type de configuration a été renforcé par la constitution d'une ligne de convergence de basses couches en vallée du Rhône. Celle-ci s'est organisée au sein d'une advection massive d'air chaud et humide d'origine tropicale (dont témoigne les hautes valeurs de thêta'w à 850 hPa, ci-dessous à droite).

L'analyse détaillée via le modèle ARW 3 km en configuration reforecast confirme la forte convergence de basses couches entre Gard et Bouches-du-Rhône notamment, à l'heure de formation de la tornade (ci-dessous à gauche). Les forts cisaillements associés à ce type de configuration ont généré une hélicité significative près du sol (SRH 0-1 km de 130 à 160 m²/s² sur la zone concernée par la tornade) :

Ainsi, en début de nuit du 7 au 8 novembre 2022, les forçages les plus dynamiques se présentent en basse vallée du Rhône et génèrent de puissants cisaillements. Ils s'appliquent à ce moment-là sur des profils verticaux rendus fortement instables par les apports en air chaud et humide générés par le flux de sud en basses couches : en pleine nuit, les valeurs de MUCAPE dépassent 2000 J/kg sur la zone (ci-dessous à gauche). Conséquemment, le potentiel de tornade est devenu significatif sur ce secteur, comme en témoigne la réaction du Significant Tornado Parameter (STP), avec des valeurs comprises entre 1,5 et 2 sur les Bouches-du-Rhône (ci-dessous à droite).