Tornade EF2 à Anduze (Gard) le 3 novembre 2011
Principales caractéristiques de la tornade
* distance parcourue : 13 kilomètres
* largeur moyenne : 250 mètres (50 mètres au départ, localement 500 mètres à Générargues)
* communes traversées : DURFORT-ET-SAINT-MARTIN-DE-SOSSENAC, TORNAC, ANDUZE, GÉNÉRARGUES, SAINT-SÉBASTIEN-D'AIGREFEUILLE
* département : GARD (30)
* altitude moyenne du terrain : 240 mètres
* type de terrain : tissu urbain discontinu ; zones industrielles et commerciales ; prairies ; systèmes culturaux et parcellaires complexes ; forêts de feuillus ; forêts de conifères ; forêt et végétation arbustive en mutation
* principaux dégâts : toitures endommagées (>20%), gros arbres déracinés ou étêtés, poteaux électriques (bois) brisés net, arbres parfois imposants brisés net près du sol, poutres métalliques et grumes de bois de 300 à 400 kilos projetés à 100 mètres, une poutre arrachée d'un bâtiment agricole et fichée dans une propriété voisine, des éléments de toits significatifs propulsés à plusieurs centaines de mètres
NB : l'intensité des tornades est déterminée sur l'échelle EF augmentée. Cette version de l'échelle EF, mise en place par KERAUNOS depuis 2009, ajoute aux critères américains une série de spécificités propres à l'habitat européen.
Parcours de la tornade
Détermination du phénomène et organisation des dégâts observés
Une enquête de terrain, menée en trois phases successives, a été effectuée par Christophe Ferré et Guillaume Artigue pour Keraunos. Elle a permis d'attester le passage d'un phénomène tourbillonnaire dont la largeur s'avère assez remarquable entre le nord d'Anduze et l'ouest de Générargues. Plusieurs mesures sur place ont permis de retenir une largeur maximale de dégâts de 500 mètres.
La tornade a traversé un secteur accidenté, sillonné de nombreux vallons, qui n'ont pas affecté la trajectoire de la tornade, mais qui ont en revanche affecté le champ de vent local autour du tourbillon et produit notamment un évasement important de la zone de dommages.
L'axe de convergence a pu être identifié grâce au pointage minutieux de l'ensemble des arbres et des pylônes électriques endommagés dans ce secteur, et dont le sens de chute indique sans conteste qu'ils ont été enveloppés dans un vaste système de vents circulaires. Cette information s'est vérifiée plus particulièrement au nord de la zone d'activités d'Anduze, à proximité d'une scierie. Le même constat a pu être effectué dans le périmètre d'un restaurant situé à l'ouest de Générargues.
Les dégâts observés et leur répartition ont de toute évidence été influencés d'une part par la vitesse de translation élevée de la tornade, et d'autre part par la nature accidentée du terrain qu'elle a traversé. En effet, les tornades dotées d'un déplacement rapide présentent régulièrement une zone de dommages asymétrique par rapport à l'axe de déplacement du tourbillon. Cette zone de dommages est alors fortement développée sur la droite de la trajectoire dans le cas des tornades à rotation cyclonique, et sensiblement plus réduite sur sa partie gauche. Cet état de fait a par exemple pu être constaté - quoique dans des proportions sensiblement moins importantes - dans le cas de la tornade de Hautmont. C'est ici la vitesse de translation de la tornade et les vents propres générés par elle qui viennent soit se conjuguer (portion droite de la trajectoire), soit se contrarier partiellement (portion gauche). L'extension horizontale de la zone de dommages se trouve dès lors accrue d'un côté et réduite de l'autre.
La forte extension horizontale de la zone de dommages, outre l'élément précédent, s'explique aussi par la traversée d'une cuvette naturelle antre Anduze et Générargues. Le passage de la tornade a de toute évidence généré un "appel d'air" dans les vallées avoisinantes, qui ont alors généré un flux de très basses couches fortement canalisé en direction de la tornade. C'est donc en toute logique que l'ensemble de la vallée a concentré de puissants vents cycloniques et subi de ce fait des dommages périphériques nombreux. Une tornade d'intensité similaire en zone de plaine aurait vraisemblablement affecté différemment le territoire traversé.
On note enfin que la tornade a eu un contact au sol relativement chaotique, notamment entre Anduze et Générargues, et tout particulièrement au niveau des berges du Gardon-d'Anduze. Il est probable que les importantes variations de relief aient perturbé le flux au niveau du sol, surtout dans un contexte de translation rapide.
Arbres sectionnés et poutres propulsées à distance
Photographies des dommages :
Coupure de presse
Parmi les nombreux articles de presse qui font part du phénomène, nous pouvons mentionner celui du Midi-Libre du 6 novembre 2011:
Après la tornade : "Il faudra du temps pour se remettre de ça"
En dix secondes, Jean Vercier a perdu vingt ans de travail. Durement frappé par la mini-tornade à Anduze jeudi soir, cet agriculteur-comptable de 45 ans, hier n’avait pas encore amorti le choc, "car il faudra du temps pour se remettre de ça". "En 2002 lors des inondations, les trois mas de cette plaine n’avaient pas été touchés. Cette fois on est détruits. On était au cœur de la bourrasque."
Le tourbillon a tourneboulé les esprits comme les bâtisses jouant au ping-pong avec des matériaux réputés solides. "Le toit de l’entrepôt de mon voisin à 300 mètres a démoli le chais et a atterri dans mon parc à cochon. Une de mes poutres arrachées est allée se ficher dans la propriété d’un camping mitoyen."
"Mes cinq toits sont en vrac"
Dans le jardin, la Citroën de sa fille écrasée sous un arbre n’est plus qu’un tas de tôle froissée. Au sol un indescriptible amas de tuiles, de plaques photovoltaïques, de fils des Télécom, de détritus en tous genres parsemant les vignes de ce petit domaine de 3 hectares témoignent de la violence des vents. "Le couvreur qui est de la région m’a dit qu’il n’avait jamais vu pareils dégâts. Mes cinq toits sont en vrac, à pétasser ou entièrement à refaire."
A terre : un buis vieux de 3 siècles et de 8 mètres de haut
À l’étage, une partie du plafond de la chambre s’est effondrée sur le lit. "Ma belle-mère est actuellement absente, sinon s’il devait y avoir une victime ce serait elle." Digne et entouré de parents et d’amis s’affairant à nettoyer les stigmates du sinistre, Jean Vercier submergé par les sanglots laisse couler ses larmes : "Je pleure tout le temps. Je ne reconnais plus le mas, je ne vois que le trou laissé par le cyclone". En particulier face à la véranda aux vitres explosées son regard se fixe sur un vide irréparable. "Les trois grands arbres qu’on voulait garder sont à terre : le noyer, le pin et un buis vieux de 3 siècles et de 8 mètres de haut." Comment ne pas verser dans l’émotion quand une partie enracinée de votre mémoire s’est envolée. Pourtant il faudra bien se relever et reconstruire, "certes, conclut-il comme pensant à haute voix parce qu’il s’agit de la maison familiale, mais est-ce que l’exploitation va subsister ? Je ne sais pas. Mais certainement pas en l’état".