Observatoire français des tornades et orages violents

L'épisode exceptionnel d'orages supercellulaires du 11 mai 2009

Un épisode orageux remarquable s'est abattu en fin d'après-midi et début de soirée sur les départements de la Charente, de la Charente-Maritime, des Landes et de la Gironde. Entre 17h et 22h locales, une série de supercellules se sont formées sur ces départements, en produisant des chutes de grêle intenses, des rafales de vent localement supérieures à 100 km/h et des précipitations diluviennes. Les stations météorologiques positionnées à proximité de ces orages rotatifs ont enregistrés des chutes thermiques de 10°C en quelques dizaines de minutes et, pour certaines, des rafales de vent voisines de 110 km/h.

Entre 18h et 19h locales, ce ne sont pas moins de 6 supercellules qui coexistaient simultanément sur ces départements. Le nombre et la simultanéité de ces orages, dont la structure supercellulaire est ordinairement peu fréquente, rendent remarquable cet épisode orageux, d'autant que l'ensemble des phénomènes sont géographiquement très proches les uns des autres.

+ En savoir plus sur l'épisode supercellulaire, dossier d'étude

 

Résumé de l'épisode

De puissantes cellules orageuses se sont formées vers 17h locales dans les environs de Bordeaux dans un premier temps. Ces dernières ont rapidement présenté des caractéristiques supercellulaires. Cet aspect a été validé une fois que les images radar ont confirmé un déplacement anormal des cellules orageuses et des structures radar typiques. Ce diagnostic a été confirmé par des photographies prises par les équipes de chasseurs d'orages présentes sur le terrain.

Après 17h30, les supercellules gagnent les Charentes et parcourent les régions de Ruffec et le sud-ouest d’Angoulême. Une supercellule moteur gauche parcourt la Charente-Maritime en direction de la Rochelle mais s’affaiblit avant d’atteindre la ville.
Enfin, deux autres supercellules circulent sur les Landes, une près de Biscarosse et la seconde au sud de Mont-de-Marsan. Ces orages persistent sous cette forme supercellulaire jusqu’à 19h00 environ (soit une durée de vie d’environ 2h, notamment pour les deux supercellules qui ont parcouru la Charente).
L’activité orageuse se décale par la suite vers la Vienne puis la région Centre sous la forme d’un puissant système orageux très organisé.

Des chutes de grêle de plus de 5 cm de diamètre, ont été relevées au passage de ces supercellules de manière localisée. On a ainsi signalé ainsi de la grêle à Rouillac (16), Blazac (16), Hendaye (64), Merignac (33), St Christoly de Blaye (33) entre autres. De fortes rafales de vent ont aussi été mesurées, avec notamment 106 km/h en Charente.

KERAUNOS avait souligné ce potentiel fortement orageux dans ses prévisions (bulletins du Samedi soir et du Dimanche soir). Il a ainsi été émis dans la prévision du Dimanche soir un avis de violents orages de niveau 3/4 pour les régions Poitou-Charentes, Centre et Pays-de-la-Loire et de niveau 2/4 pour l’Aquitaine valable pour ce lundi 11 mai. Les modèles de prévision numérique et notamment les indices de prévision convectives laissaient en effet penser qu’un épisode fortement orageux allait se produire sur ces régions à compter du lundi soir jusque tard dans la nuit.

            
Images satellite entre 15h30 et 17 TU

 

Coupures de presse

Article de La Charente Libre :

L'ORAGE DE GRÊLE A DÉVASTÉ LA CHARENTE HIER SOIR
Un millier d'hectares de vignes détruits, des maisons inondées, des toitures envolées, des routes coupées: l'orage a été d'une violence inouïe

Une vision apocalyptique! Mille hectares de vignes déchiquetées dans le Cognaçais et le Rouillacais. Des grêlons de trois centimètres qu'on ramasse à la pelle dans une bonne partie de la Charente. Une terre qui ressemble à un linceul. Des routes vertes de végétation. Des feux cassés. Des voitures endommagées. Des maisons inondées. Des toitures envolées. Fleurac, Mérignac, Foussignac, Vaux-Rouillac, Rouillac dévastées. L'orage a balayé la Charente d'ouest en est hier entre 17h30 et 20 heures. Un orage d'une violence inouïe.

«Je n'avais jamais vu ça en trente ans. J'ai traversé la cour en tee-shirt pour aller mettre les véhicules à l'abri. ça m'a arraché la peau du bras. C'était impressionnant de puissance. La grêle défonçait le capot des voitures», témoigne Alain Reboul, viticulteur à Fleurac, qui vient de perdre ses 15 hectares de vignes.
Il se retrouve avec cinq de ses collègues au carrefour de Bois-Noble à Fleurac. Le constat est amer. «Les bois de taille sont détruits. On ne pourra rien faire pendant deux ans. Il faut attendre que la nature reprenne son cycle. C'est catastrophique», lâche-t-il sous le choc.
La colère se mêle au désarroi. «C'est 80 à 90% de notre revenu qui s'envole. On a déjà tout perdu avec la diversification. On perd tout avec la météo.» Les mêmes réflexions reviennent. On parle de dégâts énormes non couverts par les assurances. De malédiction. Les comparaisons avec le gel de 1991 ou l'orage de Segonzac «il y a dix ou quinze ans» sont aléatoires. Le présent est plus fort. Trop fort pour contenir l'émotion.
Technicien à la Coopérative agricole de la Charente (CAC), Jean-Paul Dupouy tente de dresser un premier bilan. Il avance des chiffres. «Six millions d'euros, rien que pour le vignoble. Mais il y a aussi les colzas, les blés, les orges, les tournesols qui sont détruits.» Le spécialiste n'avait «jamais vu une zone aussi vaste, qui s'étend jusqu'en bas de Saint-Cybardeaux, touchée».
Les toits en éverite ont explosé. Le centre d'adultes handicapés de La Gachère est plongé dans l'obscurité. Le salon de coiffure de Marcillac-Lanville a les pieds dans l'eau.
Le champ de foire de Rouillac est couvert de feuilles cisaillées. «Dehors, on se croirait en janvier sous la neige. Sur les routes, ça patine» raconte une habitante qui n'en croit pas ses yeux.

Une maison s'effondre à Soyaux
Après avoir attaqué le Cognaçais, l'orage a poursuivi sa progression vers le sud du département et Angoulême avant de glisser en fin de soirée vers l'est et la Charente limousine. «Les grêlons étaient gros comme des œufs de pigeon. C'était d'une violence rare entre 19h30 et 20 heures», indique un Rupificaldien. Des lignes téléphoniques ont été coupées.
A Mornac, la grêle a traversé les toitures. Pulvérisé des ordinateurs. Des vitres ont cédé. Autour de l'église, c'est le déluge.
A Touvre, quelques centaines de mètres plus loin, la route de Montbron est bloquée par un mètre de boue à La Maillerie, en bas de la pisciculture. La mairie doit sortir les tracto-pelles.
A Soyaux, les pompiers déblaient une maison traversée par la foudre, impasse des Mimosas. Le premier étage est tombé. Les habitants, qui regardaient la télévision, sont sortis à temps.
A Angoulême, le tunnel de La Grand-Font est fermé. Les inondations interdisent l'accès.
A Villebois-Lavalette, les résidents de la maison de retraite se réfugient au premier étage. Il y a quarante centimètres d'eau au rez-de-chaussée. A Roumazières, la toiture du concessionnaire auto s'écroule sous la grêle. Les jardins sont broyés. «Tomates, salades, patates, il n'y a plus rien. ça commence juste à se calmer. C'était complètement fou», confie une habitante vers 22 heures.
L'orage a des soubresauts jusqu'au cœur de la nuit. De quoi provoquer des cauchemars."

Articles de Sud-Ouest :

CHARENTE MARITIME / SAINT-NAZAIRE-SUR-CHARENTE
Un impressionnant orage de grêle s'est abattu hier, vers 18 heures. Témoignages
«Ce sont des seaux de grêlons qui nous sont tombés dessus. » Roselyne est encore étourdie par l'orage de grêle qui s'est abattu sur Saint-Nazaire-sur-Charente, hier, vers 18 heures. Très violent, il a duré près de trente minutes.
Les conséquences sont multiples mais sans gravité : les champs et les fossés ont été gorgés d'eau, et environ 20 centimètres de grêlons ont tapissé le sol. L'averse de glace a même provoqué un léger accident : sans visibilité, un conducteur a percuté la clôture d'un jardin, à l'entrée de Saint-Nazaire-sur-Charente. Des morceaux de glaces gros comme « des oeufs de poule » se sont abattus sur cette commune du Pays rochefortais.
« J'étais dans mon jardin lorsque les premiers sont tombés, raconte Jean-Pierre, qui habite sur la route allant en direction de Port-des-Barques. Je suis rentré en vitesse mais je n'ai pas pu tous les éviter. » Les bleus sur ses bras en attestent : « C'est mon épouse qui m'a hurlé de ne pas rester dehors. Les morceaux de glace faisaient entre trois et quatre centimètres. »
Son potager a été haché : « Je suis dégoûté tout est foutu. » Si sa voiture aussi porte les stigmates de l'averse - le toit est bosselé et un rétroviseur a été brisé - la maison n'a subi que peu de dégâts : une tuile cassée et la peinture de son portail porte des marques. Reste une belle frayeur : « J'ai cru que les vitres de ma maison allaient exploser, ajoute-t-il. C'est comme si on avait tapé dessus à coups de masse. » Et pourtant Jean-Pierre n'est sans doute pas le plus à plaindre. D'autres habitations ont été bien plus touchées.
Notamment les jardins situés dans des cuvettes. « Mon potager est sous un mètre de grêlons, se désespère Roselyne, en pointant du doigt les tuteurs de ses plants de tomates qui affleurent à la surface. La caravane dans le hangar est foutue. » Même tarif pour les tondeuses et autres motoculteurs garés à ses côtés. La clôture en fer a même été en partie arrachée.
Les sapeurs-pompiers de Rochefort ne sont intervenus qu'une seule fois, à cause d'une inondation. Pour autant, les propriétaires des habitations touchées se sont tout de suite mis en action, à l'aide de pelles, pour nettoyer les bouches d'égouts obstruées par les débris. Mais il ne restait plus que cela à faire : attendre que les grêlons fondent, pour enfin faire les constats.

INTEMPÉRIES DANS LE BORDELAIS, LE CUBZAGAIS ET LE MÉDOC
4 700 impacts de foudre recensés par les pompiers qui ont effectué 150 interventions
Orages dévastateurs
Il faisait beau hier après-midi quand, soudain, le ciel s'est obscurci et a déversé des trombes d'eau sur Bordeaux. Ailleurs, dans le Médoc, à Mérignac, Saint-Jean-d'Illac et Saint-André-de-Cubzac, ce sont des grêlons « gros comme des balles de golf », selon certains témoins, qui se sont abattus, occasionnant de sérieux dégâts. La société Arbao, près du Chemin-Long, à Mérignac, a eu sa toiture endommagée. Les établissements Dassault ont aussi subi de plein fouet les intempéries. Le Centre administratif et technique de la gendarmerie a été inondé.
Le lycée de Saint-André-de-Cubzac a été touché. La violence, très localisée, des chutes de grêle aura détruit partiellement quelques cultures et touché les vignes, où les jeunes grappes étaient parfois déjà formées.
Les pompiers ont effectué plus de 150 interventions liées aux orages. 40 ambulances sont sorties pendant ce temps. Sur la rocade bordelaise, un accident impliquant deux voitures et un poids lourd s'est produit entre les échangeurs 20 et 21 au moment où la chaussée était inondée. Quatre blessés ont été secourus et évacués au centre hospitalier. Un garage a pris feu à Bonzac, au lieu dit Brault.

INTEMPÉRIES [EN CHARENTE]
Hier soir, de Rouillac à Blanzac, de violents orages de grêle ont causé d'énormes dégâts
"On est submergé ! » Hier soir, après le passage des orages d'ouest en est dans le département, le centre opérationnel d'incendie et de secours a été inondé d'appels. « Les intempéries ont particulièrement touché les secteurs de Rouillac, Blanzac, Angoulême et La Rochefoucaud. »

Du « jamais vu » du côté de Rouillac
« Gros comme des petits pois ». À 18 heures, les grêlons ont assommé Rouillac en se muant en « oeufs de pigeons » ou « balles de ping-pong », selon les versions. Aucune végétation n'a résisté à l'épisode orageux. Le sol est jonché de feuilles mâchées.
Les premières caves et pas-de-porte sont inondés dès 18 h 30. La salle culturelle du « 27 » fait partie des innombrables bâtiments touchés. Les toits des voitures exposées sont criblés.
Devant la boulangerie Huron, au coeur du centre-bourg, des amas de près de 50 cm de glace étaient encore chariés à la pelle à 20 heures. La population s'organise pour réguler la circulation. Corinne et Dominique Huron n'avaient « jamais vu ça ».
Un PC de crise est monté au centre de secours. Trente-sept sapeurs pompiers s'activent sous le commandement des capitaines Charrier et Lelong dans douze engins de Rouillac, Cognac, Angoulême et de l'état-major départemental.
20 h 15, sept interventions ont été effectuées, douze sont en cours, neuf autres sont programmées. Les secours dîneront sur place.
Quelques centaines de mètres plus loin, dans la campagne, au lieu-dit Chez Fleurent, c'est « la désolation ». Plus d'électricité, voitures bloquées... Bertrand Feugnet fait le tour de ses 18 ha de vignes. « Il ne reste plus rien, plus une feuille, toutes les grappes sont par terre. »
Même consternation devant ses orges, « tous les épis sont brisés en deux, retournés ». Ses maïs ont à peine mieux résisté, « il reste quelques feuilles, mais tous sont cassés ». Impossible de dire combien de centimètres sont tombés, son pluviomètre a explosé. Heureusement son groupe électrogène permettra de nourrir les cochons.

Des grêlons énormes au sud de Barbezieux
« Je ne me souviens pas de grêlons aussi gros. Un orage comme celui-là, je n'ai pas dû en voir depuis 1953. » Paul Gadras, retraité à Condéon, n'en revient pas. Le demi-hectare de kiwis (actinidiens) de sa propriété est devenu hirsute. Les branches effeuillées pointent vers le ciel maudit.
« Les arbres allaient fleurir d'ici un mois et demi. Sur les 300 à 500 fruits que compte un pied, il va en rester une cinquantaine. C'est une catastrophe ».
Les grêlons sont plus gros que des pièces de 2 ?. Sur la route, les feuilles des arbres hachées menues forment une véritable patinoire.
« Les fruits sont perdus d'avance. Les pêches, les prunes, les cerises, nombreuses cette année, sont grosses comme des noisettes. Mais une fois touché, le fruit est abîmé. Il ne pourra évoluer », se désole ce jardinier.
David Perrier, agri-viticulteur, lui aussi de Condéon, inspecte ses 25 hectares de vignes : « C'est foutu ! Je pense que la récolte de 2009 est détruite à 85 %.Toutes les tiges qui portent les grappes sont cassées. Il ne reste quasiment rien. Je venais juste d'effectuer un traitement par sulfatage. Le pire, c'est qu'il va encore falloir traiter pour que les tiges cicatrisent. »
Problème supplémentaire pour certains exploitants : ils ne sont pas assurés. « C'est beaucoup trop cher. On ne peut pas se permettre. Il ne reste qu'à espérer que la zone soit déclarée officiellement sinistrée. »
David Perrier a conservé des grêlons dans son congélateur : « On ne sait jamais. S'ils veulent voir les responsables des dégâts. »

Jardins déchiquetés et inondations à Blanzac
Hier soir vers 18 h 45 la pluie de grêlons s'est abattue avec une puissance phénoménale sur le canton de Blanzac. Le déluge a duré une bonne vingtaine de minutes, le temps de blanchir les routes et les champs d'une couche de 10 à 20 cm de grêlons compacts. Sur la RD 5 entre Chadurie et Blanzac, la visibilité étaient quasiment nulle.
À l'entrée est du bourg de Blanzac, des torrents de boue ont dévalé la colline sur une chaussée détrempée tandis qu'au centre du village les gendarmes aidaient un convoi exceptionnel à dégager la rue Marot. Très vite, les quartiers situés au fond de la vallée du Né ont été inondés. À 19 h 15 les habitants commençaient à sortir le nez de leurs habitations contemplant le désastre, des rues encore couvertes de grêlons et des jardins déchiquetés.

Deux récoltes compromises
« Rouillac est rayé de la carte. On est abasourdi, on a les larmes aux yeux. » Hier soir, Christophe Véral, président de la Fédération des viticulteurs producteurs de Cognac, peinait à réaliser la violence de l'épisode de grêle sur le Rouillacais. Il a passé sa soirée à récolter des témoignages : « C'est tombé à Rouillac, Vaux-Rouillac, Mérignac, Fleurac, Foussignac jusqu'à Jarnac. La viticulture va devoir faire preuve de solidarité. Les premiers et les deuxièmes boutons sont touchés. Ce qui veut dire qu'il n'y aura pas de récolte en 2009, ni en 2010. » Les deux syndicats, SGV et SVBC, ont également passé leur fin de journée à mesurer l'ampleur des dégâts. La grêle, très localisée, a épargné le secteur de Segonzac mais s'est abattue sur Saint-Fort-sur-le-Né, village entre Cognac et Barbezieux. Pascal Martin, viticulteur, a assisté impuissant au déluge de grêle « pendant vingt minutes ». Les intempéries ont touché douze des ses vingt hectares de vignes. Il fera le point sur ses hectares de céréales aujourd'hui. « Le champ de tournesol était tout blanc comme s'il avait neigé. J'ai téléphoné à des collègues dans le bourg de Saint-Fort. Entre 50 et 75 % de leurs vignes étaient touchées. »


Perspectives climatologiques

A ce jour, aucun épisode regroupant simultanément 6 supercellules n'a été documenté en France. Il s'agit donc, dans l'état actuel des connaissances en la matière, d'une première sur le sol français.

Certes, il est vraisemblable, pour ne pas dire certain, que des épisodes supercellulaires d'ampleur équivalente ou supérieure ont déjà frappé la France. Mais c'est la première fois qu'un épisode supercellulaire de cette ampleur est détecté en temps réel et documenté avec autant de précision.