Observatoire français des tornades et orages violents

Tornade EF1 à Argentan (Orne) le 16 février 2000

Une tornade de faible intensité (EF1) traverse le nord-est de l'agglomération d'Argentan (Orne) le 16 février 2000 à 12h50 locales. Le phénomène, qui a été vu, a produit des dégâts à la végétation et aux habitations.

La tornade d'Argentan s'inscrit dans un outbreak de tornades (épisode de tornades groupées) qui totalise au moins 2 cas pour la journée du 16 février 2000, dont la tornade EF2 de Saint-Eustache-la-Forêt (Seine-Maritime).

Enfin, la commune d'Argentan a déjà été touchée par une tornade EF2 le 28 août 1905.
 

Principales caractéristiques de la tornade

* intensité maximale : EF1, soit des vents estimés entre 135 km/h et 175 km/h
* distance parcourue : 1,5 kilomètre (distance minimale certaine)
* largeur moyenne : indéterminée

* communes traversées : ARGENTAN (les Trois Croix, quartier Lescot), UROU-ET-CRENNES (ligne à haute tension)
* département : ORNE (61)
* altitude moyenne du terrain : 165 mètres
* type de terrain : tissu urbain discontinu, équipements sportifs et de loisirs, prairies

* principaux dégâts : toitures endommagées (couvertures enlevées) ; projection de tôles à distance provenant de toits de hangars ; panneaux de signalisation tordus ou couchés ; projection de tuiles dans les rues, certaines ont été fichées dans le sol ; sapins abattus ; bâche fichée dans un pylône de ligne à haute tension

NB : l'intensité des tornades est déterminée sur l'échelle EF augmentée (English version). Cette version de l'échelle EF, élaborée et mise en place par KERAUNOS depuis 2009, ajoute aux critères américains une série de spécificités propres à l'habitat européen et permet ainsi une notation précise des tornades, valable autant pour les tornades contemporaines que pour les tornades du passé, et homogène internationalement.
 

Trajectoire de la tornade

 
© Keraunos (fond de carte : Géoportail)
 
 

"On voyait bien la spirale"

La tornade d'Argentan du 16 février 2000 touche le Nord-Est de l'agglomération, en se concentrant principalement dans une zone commerciale. Le phénomène, décrit comme une "spirale" qui "aspirait des tôles" et emmenait des objets en l'air, a parcouru une distance d'au moins 1,5 kilomètre selon un sens de déplacement du Nord-Ouest vers le Sud-Est.

Les dommages relèvent d'une intensité EF1 : toitures endommagées (couvertures enlevées) ; projection de tôles à distance provenant de toits de hangars ; panneaux de signalisation tordus ou couchés ; projection de tuiles dans les rues, certaines ont été fichées dans le sol ; sapins abattus ; bâche fichée dans un pylône de ligne à haute tension.

Le quotidien régional Ouest-France évoque la tornade dans son édition du 17 février 2000: 

Toitures découvertes et alimentation électrique interrompue hier après-midi

Mini-tornade sur Argentan

Une mini-tornade s’est abattue sur une partie de la ville d’Argentan, mercredi en début d’après-midi. Le quartier des Trois-Croix et celui de la gendarmerie mobile ont été les plus touchés. Une ligne à haute tension de 90 000 volts a également subi de gros dégâts. Pour la réparer, EDF a dû interrompre l’approvisionnement électrique de la ville durant plus d’une heure.

12h50, hier mercredi. Le ciel est sombre et le tonnerre gronde. La grêle tombe en averse sur Argentan. Le vent souffle fort. Et un peu plus fort, même, dans le quartier des Trois-Croix. A tel point qu’une mini-tornade est apparue et a touché les abords de la route de Paris, en suivant un axe Ouest-Est. Une dizaine de maisons ont été particulièrement touchées, les tuiles s’envolant dans les tourbillons.

« C’était plus fort que la tempête de décembre, explique une Argentanaise encore toute remuée par ce qui s’est passé. J’ai vu des parties de la couverture du voisin s’envoler. Le tonnerre claquait au-dessus de nos têtes. Trois à quatre coups très sourds. » Beaucoup d’habitants du quartier pavillonnaire des Trois-Croix se trouvaient chez eux à l’heure du repas. Ils ont subi, en direct, le souffle dévastateur de la tornade. « On voyait bien la spirale, commente l’un d’eux. Ma femme me disait : « Regarde, regarde, ce qui vole ! » C’était des tôles en ferraille, qui sont retombées plus loin sur les bâtiments des gardes mobiles », au quartier Lescot.

Là aussi, les toitures ont beaucoup souffert, ainsi que dans les abords de la rue des Tanneurs. La mini-tornade a poursuivi sa route, n’épargnant pas le village d’Aunou-le-Faucon.


Analyse de la situation météorologique

La tornade d'Argentan s'est développée au sein d'un très rapide flux de nord-ouest, entre des hauts géopotentiels positionnés près des Açores et un minimum dépressionnaire situé au nord de l'Ecosse. Le courant-jet résultant est puissant (ci-dessous à gauche) et le nord-ouest de la France se situe alors dans une configuration de sortie gauche fortement diffluente. Ce flux advecte de l'air très froid à l'étage moyen (ci-dessous à droite), avec des températures de -36 à -39°C à 500 hPa le long de la Manche et de la Mer du Nord, en périphérie d'une goutte froide pointée à -40°C en sortie d'Ecosse.



Au sol, un rapide flux de nord-ouest dépressionnaire est également en place. Il véhicule une masse d'air polaire maritime, qui s'enfonce sur une grande partie de la France et de l'Allemagne :


Un reforecast réalisé avec le modèle WRF-ARW en résolution 3 km, initialisé sur les conditions ERA5, confirme une situation fortement instable pour un mois de février sur le nord-ouest du pays. En fin de matinée, les valeurs de MUCAPE oscillent entre 400 et 600 J/kg du nord Bretagne à la Normandie et au Nord - Pas de Calais, avec des indices de soulèvement négatifs (ci-dessous à gauche). Dans le même temps, une forte hélicité de basses couches est présente près de la Manche et notamment en Normandie, avec une SRH 0-1 km qui esxède parfois 200 m²/s² (ci-dessous à droite). L'ensemble témoigne d'un environnement propice à des orages de masse d'air froid parfois virulents, avec potentiel tornadique notamment au passage d'une limite secondaire qui s'enfonce sur les départements normands en fin de matinée et début d'après-midi.



Les images satellite confirment la forte activité convective associée à cette situation. Ci-dessous à gauche, l'image satellite NOAA du 16 février 2000 à 08h32 TU montre déjà la présence d'une convection profonde sur le nord-ouest de la France dès le milieu de matinée, avec des sommets convectifs bouillonnants et dynamiques. Quelques heures plus tard, à 12h00 TU (ci-dessous à droite), l'image satellite METEOSAT témoigne d'une activité convective fréquente et profonde des Pays de la Loire et de la Bretagne jusqu'au nord de la France, le Benelux et l'Allemagne :


 

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