Observatoire français des tornades et orages violents

Tornade EF3 à Thonne-la-Long (Meuse) et à Virton (Belgique) le 17 juin 1904

Le 17 juin 1904, une tornade de forte intensité (EF3) frappe quatre communes de la vallée de Virton (Belgique) après avoir débuté sa course dans le secteur de Thonne-la-Long (Meuse, France). Les dégâts sont significatifs dans l'agglomération virtonaise, et tout particulièrement au niveau de l'Institut Pierrard qui est dévasté. Aucun blessé n'est toutefois à déplorer à la suite de cette tornade.
 

Principales caractéristiques de la tornade

Localisation de la tornade de Thonne-la-Long (55) du 17 juin 1904intensité maximale : EF3, soit des vents estimés entre 220 km/h et 270 km/h
* distance parcourue : 14,5 kilomètres
* largeur moyenne : 200 mètres
 
* communes traversées en France : THONNE-LA-LONG
* communes traversées en Belgique : MEIX-DEVANT-VIRTON (Sommethonne, Beauregard), ROUVROY (Dampicourt), VIRTON (avenue Bouvier, Pierrard, Bampont, Latour, Ethe), GOMERY, VIRTON (Bleid, Gévimont)
* département français : MEUSE (55)
* province belge : PROVINCE DE LUXEMBOURG
* altitude moyenne du terrain : 250 mètres
* type de terrain : territoires artificialisés, territoires agricoles, forêts et milieux semi-naturels

* principaux dégâts : arbres (feuillus) dont des ormes de taille respectable, déracinés, tordus, vrillés ; hangars démolis ; toitures en tout ou partie arrachées dont certaines emmenées à grande distance ; dégâts considérables à l'Institut Pierrard: habitations solides écroulées et presque rasées (2 000 mètres cubes de maçonnerie détruits au total) ; éléments de toitures (couvertures en zinc ou poutres) projetés à de très grandes distances ; chapelle démolie (édifice solide en briques) ; deux maisons "détruites" (pas plus d'informations) près de Virton

NB : l'intensité des tornades est déterminée sur l'échelle EF augmentée. Cette version de l'échelle EF, mise en place par KERAUNOS depuis 2009, ajoute aux critères américains une série de spécificités propres à l'habitat européen.
  

Trajectoire de la tornade

 
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Gros dégâts en Belgique

Le 17 juin 1904, une tornade transfrontalière, qui parcourt près de 15 kilomètres, ravage principalement quatre communes belges de la région virtonaise. Selon un axe Ouest-Est, légèrement incurvé vers le Sud, la tornade débute sa course près de Thonne-la-Long (Meuse, France) pour s'achever dans un hameau situé à l'est de Virton. Au-delà de ce hameau, des dégâts venteux sont encore signalés à Halanzy (10 kilomètres à l'est), mais leur nature tourbillonnaire n'a pas pu être attestée.
 
Dans une étude détaillée sur la tornade, publiée dans Ciel et Terre de juin 1904, l'auteur insiste sur l'irrégularité du couloir de dégâts, dont la largeur varie entre 50 mètres et plusieurs centaines de mètres. La répartition des débris au niveau du sol confirme par ailleurs le mouvement tourbillonnaire du vent. Également, l'hypothèse d'une tornade à multi-vortex est exprimée, mais elle n'a pas pu être vérifiée compte-tenu de l'heure tardive à laquelle le phénomène a eu lieu.

Les dégâts sont considérables à l'Institut Pierrard, où 2 000 mètres cubes de maçonnerie sont détruits, dont la chapelle qui présentait une structure en brique plutôt solide. Les ateliers de l'école des arts et métiers sont renversés de fond en comble, et des charpentes en bois sont lancées à 300 mètres de distance. Plusieurs toitures sont également soufflées et emportées.




Dans la campagne, les arbres (feuillus et résineux) sont déracinés, tordus ou vrillés. En forêt, les dommages sont également importants près de la frontière française, ainsi qu'entre Gomery et Ethe.

Ailleurs sur la trajectoire de la tornade, des hangars sont démolis et des toitures arrachées, dont certaines emmenées à grande distance. Deux maisons sont également détruites près de Virton, sans que nous n'ayons plus d'informations sur la structure des bâtiments. Miraculeusement, le centre historique de Virton ne subit aucun dommage, la tornade circulant plus au Sud.

Compte tenu des dommages observés, la tornade de Thonne-la-Long et de Virton peut être classée en intensité EF3 sur l'échelle de Fujita.

Un témoignage édifiant

Le récit suivant, emprunté aux journaux quotidiens, est livré par un témoin de l'Institut Pierrard et repris dans la revue Ciel et Terre:
 
"Vous me demandez mes impressions? Je vais tâcher de les exprimer, mais je pense qu'il faut avoir vu pour croire. Regardez plutôt autour de vous, et dites-vous que ces 2 500 mètres carrés de toitures et ces 2 000 mètres cubes de maçonnerie ont été démolis en moins de deux minutes. Je m'étais couché vers 9h30. Un gros orage grondait sur la forêt de Chiny au nord et sur les bois de France au sud. C'était un vrai scintillement perpétuel d'éclairs dans tous les sens, mais Pierrard était indemne. Petit à petit, l'orage se rapprocha pourtant. Je ne dormais pas, la chaleur était accablante. Le train de 22h23 venait de passer depuis deux minutes, fort heureusement pour les voyageurs. J'entends le vent qui siffle à travers ma fenêtre et ma porte d'une façon inquiétante. Je me figure aussitôt avoir laissée ouverte la fenêtre de la chambre voisine et me lève pour la fermer. Tout était en ordre et le sifflement augmentait toujours. Il y avait quinze secondes que j'avais remarqué ce bruit extraordinaire, quand devant moi toutes les vitres se cassent avec fracas. Un roulement indéfinissable et épouvantable se fait entendre. Des planches, des ardoises, de la chaux etc. pénètrent dans ma chambre par les croisées. Au-dessus de moi, en dessous de moi tout danse. Un vacarme, dont rien ne peut donner l'idée, dure pendant deux minutes, peut-être pendant une demi-minute; j'avais perdu conscience du temps. Enfin le vent tombe, je puis sortir.

Spectacle inoubliable, lamentable! Nous n'avons plus de jardin, plus d'arbres, plus d'ateliers, plus de chapelle. Des poutres, des ardoises, des planches, des tuiles, du zinc, couvrent le sol. Nous nous apercevons d'abord qu'un tas de plusieurs mètres cubes de bois de charpente est venu frapper la façade de la maison d'habitation. C'est une partie de la charpente des ateliers. Elle a été transportée à 60 mètres et à une hauteur de 8 mètres. Tout à l'heure, nous retrouverons au dortoir des cheminées de forges et plus tard on découvrira dans les campagnes, à 300 mètres des ateliers, de gros madriers de sapin. Le zinc a été enlevé jusqu'à Belmont, à 2 kilomètres de Pierrard. Les ateliers sont démolis jusqu'au pied. Il n'en reste presque rien. Leur outillage si parfait est broyé sous les murs. La ferme et le magasin des ateliers ne sont pas renversés, mais des 750 mètres carrés de toitures il n'en reste pas 50.

Les grands arbres qui faisaient le charme de Pierrard, la grande allée de sapins, les arbres fruitiers sont presque tous brisés à 2 mètres du sol.

Les dégâts se montent à 125 000 francs.

A 100 mètres plus haut et à 100 mètres plus bas que l'école, aucun désastre. L'établissement s'est trouvé exactement dans l'axe du cyclone."


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